Délais de rétractation de la rupture conventionnelle

Pour se rétracter de la rupture conventionnelle, il faut envoyer la lettre de rétractation avant la fin du délai de 15 jours calendaires. (Cass. Soc. 19.06.2019 : RG n° 18-22897).

La rupture conventionnelle comme mode amiable de rupture du contrat de travail

La rupture conventionnelle est un mode amiable de rupture du contrat de travail, venant en plus du licenciement et de la démission (c. trav. art. L1237-11 et suivants).

Il s’agit d’une solution alternative plus apaisée.

Si l’employeur et le salarié se sont mis d’accord pour rompre le contrat de travail, seule la voie de la rupture conventionnelle leur est ouverte, sauf dispositions légales contraires.  

La rupture conventionnelle n’est possible que pour la rupture du contrat de travail à durée indéterminée.

La procédure de rupture conventionnelle

Une rupture conventionnelle obéit à différentes étapes obligatoires :

  • La convocation du salarié à un entretien.

Lors de cet entretien, l’employeur et le salarié se mettent d’accord sur le principe et le montant de la rupture du contrat de travail.

Le salarié tout comme l’employeur peuvent se faire assister durant cet entretien.

Le salarié peut se faire assister par un autre salarié de l’entreprise (ex. : délégué syndical ou délégué du personnel) ou, en l’absence de représentant du personnel dans l’entreprise, par un conseiller choisi sur une liste dressée par l’administration. Il doit informer alors l’employeur s’il se présente accompagné.

  • La signature de la rupture conventionnelle par l’employeur et le salarié.

La convention de rupture doit être signée et doit comporter la mention exacte de la date de fin du contrat.

Elle doit comporter également le montant inscrit en chiffres et en lettres de l’indemnité versée au salarié. Cette indemnité de rupture conventionnelle ne peut pas être inférieure au montant de l’indemnité de licenciement.

Le formulaire de rupture conventionnelle doit être daté et signé par l’employeur et le salarié et faire figurer à côté de la signature la mention « lu et approuvé ».

Chaque partie doit conserver un exemplaire signé de la convention de rupture.

À partir du lendemain de la signature de la convention, l’employeur et le salarié ont chacun un délai de 15 jours calendaires pour se rétracter.

Si aucune des parties n’a exercé son droit de rétractation, l’employeur – ou la partie la plus diligente, doit au lendemain du terme de ce délai de rétractation, adresser un exemplaire de la convention à la DIRECCTE, aux fins d’homologation.

  • L’homologation par la DIRECCTE.

La DIRECCTE dispose d’un délai de 15 jours ouvrables pour se prononcer.

La date d’échéance de ce délai d’instruction est celle à laquelle l’employeur et le salarié reçoivent de manière effective le courrier de l’administration (Cass. Soc. 16.12.2015 : n°13-27212).

Une fois passé le délai d’instruction, l’absence de décision explicite de la DIRECCTE vaut acceptation de la convention de rupture conventionnelle.

Le contrat de travail est alors rompu et le salarié sort des effectifs de l’entreprise.

La rétractation de la rupture conventionnelle

Le délai de rétractation de la rupture conventionnelle est de 15 jours calendaires.

Le point de départ est fixé au lendemain de la signature de la convention par l’employeur et le salarié.

Le dernier jour est le quinzième jour, à minuit.

Le décompte en jour calendaire implique que chaque jour de la semaine est décompté du lundi au dimanche, y compris donc les dimanche et jour férié.

Lorsque ce délai de rétractation expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il doit être prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant (par exemple le lundi si le dernier jour expire un samedi ou un dimanche) (c. trav. art R 1231-1).

Exemple d’un calcul de délai de rétractation de rupture conventionnelle

Si la rupture conventionnelle a été signée le lundi 1er juillet

Le premier jour du délai de rétractation de la rupture conventionnelle est le mardi 2 juillet.

Il convient de compter chaque jour, du 1er au 15ème.

Le 15ème est donc le 16 juillet.

Les parties peuvent se rétracter jusqu’au 16 juillet inclus.

Les modalités de la rétractation d’une rupture conventionnelle

En application de l’article L 1237-13 du Code du travail, chacune des parties, que ce soit l’employeur comme le salarié, dispose de ce délai de 15 jours calendaires pour exercer son droit à rétractation.

Ce droit doit être exercé sous la forme d’une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l’autre partie.

En pratique, il est conseillé d’utiliser la lettre recommandée avec accusé de réception, pour des questions de preuve.

La Cour de cassation avait déjà jugé que la fin de ce délai de rétractation doit s’apprécier à la date d’envoi de la lettre par le salarié et non à sa date de réception par l’employeur (Cass. soc. 14.02.2018 n°17-10035).

Cet arrêt du 19 juin 2019 (Cass. Soc. 19.06.2019 : RG n° 18-22897) confirme donc la jurisprudence de la Haute Juridiction, dans la posture de l’employeur qui se rétracte cette fois-ci.

En l’espèce, une rupture conventionnelle avait été signée le 21 janvier 2015.

L’employeur avait finalement décidé de se rétracter par lettre envoyée le 3 février 2015.

Le salarié l’avait reçue le 6 février 2015, c’estàdire après la date d’expiration du délai de rétractation.

Le salarié avait saisi la juridiction prud’homale, notamment aux fins de condamnation de l’employeur à lui verser l’indemnité spéciale de rupture.

Les juges du fond, dont la Cour d’appel, avaient donné raison au salarié, qui arguait du fait que c’est à la date de réception de la lettre, et non à celle de l’envoi qu’est apprécié l’exercice du droit de rétractation de la rupture conventionnelle.

Faux ! lui rétorque la Cour de cassation, saisie par l’employeur.

C’est bien la date d’envoi de la lettre de rétractation qui compte.

La lettre de rétractation, adressée au salarié avant la date d’expiration du délai de rétractation devait produire ses effets, c’est-à-dire, l’annulation de la rupture conventionnelle signée.

L’employeur était encore dans le délai de 15 jours calendaires pour exercer son droit de rétractation.

Si cette solution est intéressante en ce qu’elle permet de préserver les intérêts des parties, elle peut tout de même poser des difficultés dans les faits.

En effet, les parties, employeur comme salarié, peuvent envoyer à la DIRECCTE la demande d’homologation de la rupture conventionnelle dès le lendemain de l’expiration du délai de rétractation c’est-à-dire en réalité dès le 16ème jour.

Or, si la lettre de rétractation a été envoyée le 15ème jour du délai de rétractation, elle n’est pas reçue au moment de l’envoi de la demande d’homologation à la DIRECCTE.

Les lettres se croisent pour ainsi dire, en toute bonne foi.

La DIRECCTE peut donc homologuer en toute bonne foi une rupture conventionnelle, en ignorant l’exercice tardif, certes dans le délai, du droit de rétractation.

Malgré tout, c’est la rétractation qui va primer sur l’homologation de la DIRECCTE.

La rupture ne sera pas actée et le salarié sera maintenu en poste.

Il faut donc agir avec la plus grande prudence en matière de rupture conventionnelle et être conseillé, que l’on soit employeur ou salarié.

Sources :

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 19 juin 2019 : RG n°18-22897

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 16 décembre 2015 : RG n°13-27212

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 14 février 2018 : RG n°17-10035

Par Maitre Virginie LANGLET le 2 juillet 2019

Avocat au Barreau de Paris

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