Abandon de poste = présomption de démission selon le Sénat

Ça y est nous y sommes, le Sénat a enfoncé le clou.

Comme nous vous l’expliquions, l’Assemblée nationale a adopté en 1ère lecture le projet de loi « marché du travail » le 5 octobre 2022.

L’objectif est de réformer le régime de l’assurance chômage visant à supprimer la prise en charge par Pôle emploi des salariés ayant été licenciés après l’abandon de poste.

Les sénateurs ont voté le 25 octobre 2022 la présomption de démission.

Comment cela va-t-il se passer ?

Par une lettre de mise en demeure adressée au salarié, l’employeur demandera de justifier son absence et de reprendre son poste dans un délai qui sera fixé par l’employeur.

Ce délai ne pourra pas être inférieur à un minimum fixé par décret en Conseil d’État (projet de loi, art. 1 bis A).

A l’expiration de ce délai, le salarié serait présumé démissionnaire.

Présomption, ça veut dire quoi ?

Par principe, la reconnaissance d’un droit nécessite la preuve de l’existence de ce droit.

Parfois, dans certaines circonstances, la preuve directe est impossible.

La loi attache a donc créé la présomption : certains faits apparents ont un effet équivalent à celui de la preuve. Ces faits se dénomment « présomptions ».

Être présumé démissionnaire c’est reconnaitre que par principe, le salarié a démissionné.

Mais pour en être certain, il est possible de prouver cette démission, ou bien prouver qu’il n’a pas démissionné.

Présomption de démission = fini Pôle Emploi

Avec la présomption de démission que souhaitent instaurer les sénateurs, point de prise en charge du chômage par l’allocation retour à l’emploi (ARE).

Les Sénateurs ont clairement précisé qu’il n’est pas souhaitable qu’un salarié licencié à l’issue d’un abandon de poste dispose d’une situation plus favorable en matière d’assurance chômage qu’un salarié qui démissionne et qui n’est pas indemnisé.

Cela peut s’entendre.

Mais il existera toujours d’autres possibilités pour les salariés de quitter l’entreprise et de bénéficier de l’assurance chômage.

Et puis, il faut bien reconnaitre que c’est tout le régime juridique de la démission qui est mis à mal avec cette réforme.

En effet, le code du travail est très clair : la démission ne se présume pas (C. trav., art. L. 1231-1 ; C. civil art. 1130, etc) …

En cas de contentieux, le juge vérifie si, au moment où elle a été donnée, la démission résultait d’une volonté claire et non équivoque du salarié de mettre fin au contrat de travail (Cass. soc. 9 mai 2007, n° 05-40315 ; Cass. soc. 28 novembre 2012, n° 11-20954).

Donc, si l’abandon de poste entraine une présomption de démission, qu’en est il de la démission qui ne se présume pas ??

A voir sur le long terme si cette loi, une fois votée et appliquée, aura des effets bénéfiques pour la stabilisation des effectifs dans les entreprises.

Pour plus de précisions : lire ici

Sources :

Troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale considérée comme adoptée en première lecture le 24 octobre 2022

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 9 mai 2007, RG n° 05-40315

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 28 novembre 2012, RG n° 11-20954

Par Maitre Virginie LANGLET le 27 octobre 2022

Avocat au Barreau de Paris

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www.cabinet-avocats-langlet.fr

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