Remise de la lettre de licenciement pour faute grave

L’employeur doit s’assurer que le salarié a bien reçu la lettre de licenciement pour faute grave

En cas de licenciement pour faute grave, l’employeur doit s’assurer que le licenciement a bien été notifié au salarié, c’est-à-dire, que le salarié a bien reçu la lettre de licenciement (Cass. Soc. 22.02.2017 : n°15-18475).

La simple remise des documents de fin de contrats, si le salarié n’a pas reçu la notification de son licenciement, rend le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse.

La hiérarchie des fautes

Il existe quatre types de fautes, selon leur gravité. Chacune de ces fautes a des incidences différentes sur le contrat de travail et le droit des salariés.

Les fautes sont :

  • La faute légère,
  • La faute simple,
  • La faute grave,
  • La faute lourde.

Ainsi, une faute peut, selon les circonstances, constituer une faute légère, une faute simple, une faute grave ou une faute lourde, compte tenu notamment de la position hiérarchique du salarié, de ses antécédents, de ses responsabilités et des conséquences dommageables ou non pour l’entreprise.

La graduation de la faute revient entièrement à l’employeur. Si nécessaire, il doit pouvoir démontrer avec objectivité, que les agissements du salarié étaient bel et bien fautifs.

Définition de la faute grave

La faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien de l’intéressé dans l’entreprise et peut justifier une mise à pied conservatoire (Cass. soc. 27.09.2007 : n°06-43867 ; Cass. soc. 10.11.2010 : n°09-42077).

Si, prises isolément, certaines fautes commises par un salarié ne sont pas graves, elles peuvent le devenir par réitération ou accumulation (Cass. soc. 21.10.2009 : n°08-43219).

Déclenchement de la procédure de licenciement pour faute grave

En application de l’article L 1332-4 du code du travail, l’employeur dispose d’un délai de 2 mois pour déclencher la procédure disciplinaire dès l’instant où il apprend qu’un salarié a commis une faute.

Toutefois, la faute grave rendant impossible le maintien du salarié dans l’entreprise, l’employeur doit engager la procédure de licenciement dans un « délai restreint » après avoir été informé des faits allégués dès lors qu’aucune vérification n’est nécessaire (Cass. soc. 6 octobre 2010 : n°09-41294 ; Cass. soc. 24 novembre 2010 : n°09-40928). La durée de ce délai « restreint » n’est pas précisément définie, mais lorsque l’employeur tarde à agir, les juges peuvent remettre en cause la gravité réelle des faits reprochés.

Par exemple, différer le licenciement de 6 mois est incompatible avec la notion de faute grave, de même que le maintien en poste du salarié durant une période d’un mois. Le licenciement s’il est prononcé, sera requalifié sans cause réelle ni sérieuse. C’est ainsi que le licenciement pour faute grave implique obligatoirement le départ immédiat du salarié, sans préavis. À défaut, la faute grave ne pourra pas être retenue par les juges (Cass. soc. 12 juillet 2005 : n°03-41536).

La procédure de licenciement

La procédure de licenciement impose à l’employeur de respecter les étapes suivantes.

1°) La convocation à entretien préalable
Elle doit se faire par lettre recommandée (avec accusé de réception, en pratique) ou lettre remise en main propre contre décharge (article L 1232-2 du code du travail).

Si le licenciement a un motif disciplinaire (comme la faute grave du salarié), la convocation doit, par principe, être envoyée dans un délai de 2 mois à compter du jour où l’employeur ou le supérieur hiérarchique (si l’employeur est une personne morale) a eu connaissance du fait fautif (Cass. soc. 16 septembre 2003 : n°01-42712).

2°) L’entretien préalable à licenciement
Il ne peut pas avoir lieu moins de 5 jours pleins et ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou sa remise en main propre (article L1232-2 du code du travail). Le salarié ne peut pas renoncer à l’application de ce délai minimal (Cass. soc. 28 juin 2005 : n°02-47128), mais il peut en demander le report.

Le jour de remise de la lettre ne compte pas dans ce délai. De plus, si ce délai expire un samedi, dimanche ou jour férié, il est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant (Cass. soc. 20 février 2008 : n°06-40949 ; Cass. soc. 3 juin 2015 : n°14-12245).

La notification du licenciement

La notification du licenciement au salarié concerné doit se faire par lettre recommandée avec accusé de réception, avec indication précise du ou des motifs du licenciement. La lettre de licenciement ne peut pas être expédiée moins de 2 jours ouvrables après la date de l’entretien (article L 1232-6 du code du travail) et, en cas de licenciement disciplinaire, plus de 1 mois après le jour fixé pour l’entretien préalable (article L 1232-2 C. trav.; Cass. soc. 16 mars 1995 : n°90-41213).

La Cour de Cassation avait précisé que par principe, la date de la rupture du contrat de travail se situe au jour où l’employeur envoie la lettre de licenciement (Cass. Soc. 04.03.2015 : 13-16148), remet, ou tente de remettre celle-ci en main propre au salarié (Cass. Soc.16.12.2009 : n°08-42922).


Mais quid de l’envoi de la lettre de licenciement à un tiers ?

La Haute Juridiction a déjà eu l’occasion de rappeler que la lettre de licenciement adressée à un tiers (par exemple, l’avocat du salarié) et non au salarié lui-même ne peut en aucun cas être considéré comme une lettre de licenciement (Cass. Soc. 30.11.1994 : n°93-42184). Dans l’arrêt commenté du 22 février 2017(Cass. Soc. 22.02.2017 : n°15-18475), un salarié avait élu domicile au cabinet de son avocat s’agissant de sa correspondance. Il avait donc demandé à son employeur d’adresser les lettres qui lui étaient destinées à son avocat, et non à lui-même. La lettre de licenciement envoyée par l’employeur, était revenue à ce dernier avec la mention « non réclamée ». Le salarié n’avait donc pas été informé de la mesure de licenciement disciplinaire dont il avait fait l’objet, le courrier ayant été envoyé à son domicile. Il contestait le licenciement devant la juridiction prud’homale, en soutenant que la mesure était sans cause réelle et sérieuse. Pour lui, cette mention « non réclamée » n’était pas de nature à établir le respect par l’employeur de son obligation de délivrer, par quelque moyen que ce soit, les causes du licenciement

La Cour de cassation, qui partage l’avis de la Cour d’appel, a considéré que l’employeur n’établissait pas que la lettre de licenciement ait été portée à la connaissance du salarié. L’employeur aurait dû adresser cette lettre à l’avocat du salarié, en plus du domicile du salarié, et ce dans le délai d’un mois à compter de l’entretien préalable à licenciement.

Sources :

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 22 février 2017 : RG n°15-18475

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 27 septembre 2007 : RG n°06-43867

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 10 novembre 2010 : RG n°09-42077

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 21 octobre 2009 : RG n°08-43219

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 6 octobre 2010 : RG n°09-41294

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 24 novembre 2010 : RG n°09-40928

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 6 octobre 2010 : RG n°09-41294

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 16 septembre 2003 : RG n°01-42712

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 12 juillet 2005 : RG n°03-41536

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 28 juin 2005 : RG n°02-47128

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 20 février 2008 : RG n°06-40949

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 3 juin 2015 : RG n°14-12245

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 16 mars 1995 : RG n°90-41213

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 6 mars 2015 : RG n°13-16148

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 16 décembre 2009 : RG n°08-42922

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 30 novembre 1994 : RG n°93-42184

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