Réintégration après nullité du licenciement

En cas de réintégration après nullité du licenciement, les congés ne sont pas récupérés

En cas de licenciement nul et de réintégration du salarié licencié, la période d’éviction ouvre droit, non à une acquisition de jours de congés, mais à une indemnité d’éviction, le salarié ne peut bénéficier effectivement de jours de congés pour cette période (Cass. Soc. 11.05.2017 : n°15-19731).

Les cas de nullité de licenciement

Le juge ne peut annuler un licenciement que dans les cas expressément prévus par la loi ou dans l’hypothèse de la violation d’une liberté fondamentale (ex. : liberté d’agir en justice) (Cass. soc. 19 juin 2002, n°00-43658 ; Cass. soc. 30 octobre 2002, n°00-45608 ; Cass. soc. 3 février 2016, n°14-18600).

Il s’agit, notamment, des licenciements :

  • discriminatoires ou prononcés suite à une action en justice du salarié fondée sur l’interdiction des discriminations (c. trav. art. L 1132-1 à L 1132-4 ;
  • prononcés en méconnaissance de la protection accordée aux victimes d’accident du travail ou de maladie professionnelle (c. trav. art. L 1226-13) ;
  • prononcés en méconnaissance de la protection accordée aux représentants du personnel et syndicaux ainsi qu’aux candidats aux élections professionnelles (c. trav. art. L2411-3 ; L 2411-5 ; L 2411-8 ; L 2411-10) ;
  • prononcés en méconnaissance des règles protectrices de la maternité (c. trav. art. L1225-4 ; L 1225-4-1 et L 1225-5 ;
  • prononcés en l’encontre d’un lanceur d’alerte du fait de l’alerte ;
  • etc.

Les sanctions de la nullité du licenciement

La réintégration du salarié

La nullité du licenciement, quel qu’en soit le motif, entraîne de plein droit la réintégration sur demande du salarié. La réintégration s’impose à l’employeur, sauf impossibilité matérielle. La liquidation de l’entreprise constitue une impossibilité matérielle à la réintégration (Cass. soc. 20 juin 2006, n°05-44256).

En revanche, il n’y a pas d’impossibilité matérielle lorsque les fonctions du salarié devant être réintégré ont été confiées à un prestataire extérieur (Cass. soc. 14 septembre 2016, n°15-15944). Le salarié réintégré a droit au versement des salaires perdus entre son licenciement et sa réintégration (Cass. soc. 25 janvier 2006, n°03-47517).

Les revenus de remplacement et les rémunérations perçus pendant cette période doivent être déduits de ce versement (Cass. soc. 12 février 2008, n°07-40413), sauf lorsque le licenciement est déclaré nul pour cause de discrimination (ex. : grève, activité syndicale, état de santé) (Cass. soc. 11 juillet 2012, n°10-15905 ; Cass. soc. 9 juillet 2014, n°13-16434) ou qu’il est déclaré nul en raison de la violation du statut protecteur d’un salarié protégé (à savoir, licenciement sans autorisation administrative) (Cass. soc. 10 novembre 2006, n° 04-47623). Dans ce dernier cas, le salarié peut cependant être condamné à rembourser les allocations de chômage à Pôle Emploi.

Le droit à indemnité en cas de défaut de réintégration

Si le salarié ne demande pas sa réintégration ou si celle-ci est jugée matériellement impossible, il peut obtenir :

les indemnités de rupture : indemnités de licenciement (indemnité légale ou conventionnelle), indemnités de préavis ;

en cas d’irrégularité de la procédure de licenciement, la réparation du préjudice lié à cette irrégularité soit par une indemnité distincte, soit par une somme comprise dans l’évaluation globale du préjudice résultant de la nullité du licenciement (Cass. soc. 23 janvier 2008, n°06-42919) ;

des dommages-intérêts réparant l’intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement, dont le montant, souverainement apprécié par les juges du fond, est au moins égal à 6 mois de salaire quels que soient l’ancienneté du salarié et l’effectif de l’entreprise (Cass. soc. 14 avril 2010, n°09-40486).

Si la nullité du licenciement est due à une absence ou à la nullité du plan de sauvegarde de l’emploi, ce minimum peut être au moins égal aux 12 derniers mois de salaire si le salarié a au moins 2 ans d’ancienneté, ou à la réparation du préjudice subi s’il a moins de 2 ans d’ancienneté (c. trav. art. L1235-11 et 1235-14).

Le sort des congés payés que le salarié aurait pu percevoir durant son exclusion

La question s’est posée dans l’arrêt du 11 mai 2017 (Cass. Soc. 11.05.2017 : n°15-19731) de savoir si un salarié dont le licenciement est annulé et qui est réintégré dans l’entreprise peut obtenir le report des congés qu’il aurait dû acquérir pendant la période d’éviction et qu’il n’a pas pu prendre par la faute de l’employeur. Dans l’arrêt commenté, un salarié en contrat à durée déterminée jusqu’au 3 août 2008 est victime d’un accident du travail et est placé en arrêt de travail jusqu’au 4 mars 2009.

En avril 2008, il saisit le conseil de prud’hommes d’une demande de requalification de son CDD en CDI et obtient gain de cause en 2010. Or entre-temps, l’employeur lui notifie la rupture de son contrat à l’échéance de celui-ci (3 août 2008).

A tort : en mettant fin au contrat de travail pendant l’arrêt de travail du salarié, l’employeur n’a pas respecté la protection attachée aux salariés en accident du travail. Les juges du fond, dans un précédent jugement, analyse cette rupture en un licenciement et ordonne la réintégration du salarié.  La réintégration a eu lieu le 8 septembre 2014. Si le salarié a bien perçu le rappel des salaires qu’il n’avait pas perçu pendant la période d’éviction, il demande également :

  • à bénéficier des jours de congés payés qu’il avait, selon lui acquis, pendant la période durant laquelle le contrat de travail a été rompu ;
  • à les reporter dans la mesure où il a été dans l’impossibilité de les prendre par la faute de l’employeur.

Les juges du fond rejettent sa demande. Toutefois, s’ils excluent la possibilité pour le salarié de bénéficier des jours de congés payés demandés, ils lui reconnaissent la possibilité de bénéficier d’une indemnité compensatrice de congés payés. La Cour de cassation ne partage pas totalement cet avis et affirme que le salarié n’acquiert pas de congés payés pendant la période d’éviction.

Il perçoit une indemnité d’éviction destinée à réparer le préjudice subi au cours de cette période qui s’est écoulée entre son licenciement et sa réintégration.

Sources :

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 11 mai 2017 : RG n°15-19731

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 19 juin 2002 : RG n°00-43658

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 30 octobre 2002 : RG n°00-45608

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 3 février 2016 : RG n°14-18600

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 20 juin 2006 : RG n°05-44256

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 14 septembre 2016 : RG n°15-15944

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 25 janvier 2006 : RG n°03-47517

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 12 février 2008 : RG n°07-40413

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 11 juillet 2012 : RG n°10-15905  

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 9 juillet 2014 : RG n°13-16434

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 10 novembre 2006 : RG n° 04-47623

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 23 janvier 2008 : RG n°06-42919

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 14 avril 2010 : RG n°09-40486

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