Le salarié victime de harcèlement moral qui agresse verbalement son supérieur ne commet pas de faute grave

L’agression verbale commise par un salarié dont le comportement résulte de son état pathologique, conséquence du harcèlement moral dont il était victime, ne constitue pas une faute grave (Cass. Soc. 12 mai 2021 : n°20-10512).

Qu’est ce que le harcèlement moral ?

Les éléments constitutifs du harcèlement moral sont de manière cumulative (c. trav. art. L. 1152-1) les suivants :

  • Les agissements répétés par l’un des salariés à l’égard d’un autre salarié qui en est la victime,
  • La dégradation des conditions de travail de ce salarié victime des agissements fautifs,
  • L’atteinte à ses droits, sa dignité, son état de de santé physique et/ou moral,
  • Les conséquences dommageables sur son avenir professionnel.

L’impact du harcèlement moral sur les conditions de travail, la dignité et l’état de santé est la conséquence majeure du harcèlement moral sur le salarié qui en est victime.

Qu’est-ce qu’une faute grave ?

 Un salarié peut se voir reprocher un comportement, qualifié, selon sa gravité de faute :

  • légère ;
  • simple ;
  • grave;
  • lourde.

Chacune de ces fautes, selon leur gravité, a des incidences différentes sur le contrat de travail et les droits des salariés.

La faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié fautif dans l’entreprise, même pendant le préavis (Cass. soc. 27 septembre 2007, n° 06-43867).

La faute grave entraine, dans la plupart des cas, une mise à pied conservatoire, préalablement à la mise en place d’une procédure disciplinaire.

La faute grave entraine également un licenciement, qui prive le salarié de ses indemnités de licenciement et de son préavis.

Le harcèlement moral peut il être une circonstance atténuante d’un comportement agressif ?

La réponse est oui (Cass. Soc. 12 mai 2021 : n°20-10512).

Dans cette affaire, un salarié avait eu un comportement violent à l’égard de sa supérieure hiérarchique. Il l’avait agressée verbalement.

Une agression physique avait été empêchée in extremis grâce à l’intervention d’un tiers.

Le salarié avait finalement été licencié pour faute grave avec mise à pied conservatoire.

L’employeur estimait que l’attitude agressive et violente du salarié à l’égard de sa hiérarchie constituait une faute grave.

La Cour d’appel, au contraire, avait retenu que le salarié produisait 36 attestations indiquant qu’il était « un grand professionnel » « extrêmement courtois et d’humeur égale », « une personne courtoise et avenante », qu’il avait une personnalité singulière mais très attachante, calme et très professionnelle.

Les juges avaient également retenu que l’attitude violente et agressive du salarié ne résultait que de son état de santé nécessitant un suivi psychiatrique, en raison d’une situation de harcèlement moral dont il était victime au sein de l’entreprise.

La Cour d’appel avait donc requalifié le licenciement en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Ce que confirme la Cour de cassation.

Pour la Cour de cassation, l’agression verbale commise par le salarié résultait de son état pathologique, conséquence du harcèlement moral dont il était victime.

Ce comportement ne peut constituer une faute grave, en raison de cette circonstance atténuante.

Nous attirons l’attention du lecteur sur un point qu’il convient de retenir : le harcèlement moral doit être avéré pour constituer une circonstance atténuante.

A défaut de preuve, le licenciement ne sera pas invalidé.

Sources :

Cour de cassation, chambre criminelle, arrêt du 12 mai 2021 : RG n° 20-10512

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 27 septembre 2007 : RG n° 06-43867

Par Maitre Virginie LANGLET le 11 juin 2021

Avocat au Barreau de Paris

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