Le salarié qui refuse de signer le CDD est de mauvaise foi

Si le contrat de travail à durée déterminée n’est pas signé, il sera requalifié en un CDI, sauf si c’est le salarié qui a refusé délibérément de mauvaise foi de le signer (Cass. Soc. 10.04.2019 : RG n° 18-10614).

La conclusion d’un CDD

Le contrat de travail à durée déterminée est l’exception, contrairement au contrat de travail à durée indéterminée qui est la règle.

C’est la raison pour laquelle le régime juridique du CDD s’inscrit dans un cadre légal très strict.

Un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire, et seulement dans certaines hypothèses limitativement prévues par la loi.

Les règles impératives de validité d’un CDD que doit respecter l’employeur sont prévues par l’article L.1242-12 du code du travail :

  • Le CDD doit être écrit ;
  • Le CDD doit être signé par les parties ;
  • Le CDD doit comporter la définition précise de son motif et ce, quel que soit le cas de recours.

Le CDD doit aussi préciser (c. trav. art. L. 1242-12) :

  • Lorsqu’il est conclu pour remplacer un salarié absent, le nom et la qualification du salarié remplacé (Cass. soc. 26 octobre 1999, n° 97-40894) ;
  • Lorsqu’il comporte un terme précis, la date d’échéance du terme et, le cas échéant, une clause de renouvellement ;
  • Lorsqu’il ne comporte pas de terme précis, la durée minimale pour laquelle il est conclu ;
  • La désignation du poste de travail ou de l’emploi occupé ;
  • L’intitulé de la convention collective applicable ;
  • Le montant de la rémunération et de ses accessoires ;
  • Le nom et l’adresse de la caisse de retraite complémentaire et de l’organisme de prévoyance ;
  • La durée de la période d’essai éventuellement prévue.

Le CDD non conforme est requalifié en CDI

Si l’employeur (et le salarié) ne respecte pas les règles de fond et de forme précitées, spécifiques au contrat de travail à durée déterminée, la sanction est lourde : le contrat de travail à durée déterminée est requalifié par le juge en un contrat de travail à durée indéterminée (c. trav. art. L. 1245-1).

Il s’agit alors d’une « requalification-sanction ».

Citons les exemples suivants :

  • Lorsque le CDD est conclu en dehors des cas de recours autorisés ;
  • Lorsque les mentions obligatoires ne figurent pas dans le contrat ;
  • Lorsque les règles relatives à la durée du CDD ne sont pas respectées

La sanction est également la requalification en CDI lorsque le contrat à durée déterminée n’est pas écrit ou signé par salarié (Cass. soc. 26 octobre 1999, n° 97-41992 ; Cass. soc. 12 décembre 2012, n° 11-14823).

Si le CDD est requalifié et qu’il est arrivé à son terme, la rupture du contrat s’analyse en un licenciement (Cass. soc. 13 décembre 2007, n° 06-44004).

Ce licenciement est le plus souvent irrégulier et injustifié car l’employeur n’a, en pratique, pas respecté la procédure de licenciement ni envoyé de lettre de licenciement (Cass. soc. 11.07.2000, n° 98-41798; Cass. soc. 10.06.2003, n° 01-40808).

En outre, l’employeur est condamné à verser les indemnités de rupture du CDI :

  • Indemnité de licenciement,
  • Indemnité compensatrice de préavis.

Le salarié se verra attribuer les indemnités légales ou conventionnelles de licenciement et l’indemnité de préavis en plus, le cas échéant, de l’indemnité de requalification (Cass. soc. 3 juin 2009, n° 08-41037).

En effet, l’employeur est condamné à verser une indemnité de requalification : elle est au moins égale à 1 mois de salaire (c. trav. art. L. 1245-2).

Le défaut de signature du CDD par les parties

Le CDD non signé par le salarié encourt la requalification en un CDI, comme indiqué.

La Cour de Cassation a récemment rappelé que l’absence de signature du CDD par l’employeur est également assimilée à un défaut de contrat écrit et c’est la raison pour laquelle elle entraîne la requalification en CDI (Cass. soc. 14.11.2018, n° 16-19038).

Il existe une exception à la sanction de la requalification.

Cette exception est apparue dans l’arrêt du 7 mars 2012 de la Cour de Cassation.

La Haute juridiction précisait dans cet arrêt que par principe, si le contrat qui ne comporte pas la signature du salarié est réputé à durée indéterminée, il en est autrement si le salarié a délibérément refusé de signer le contrat de mauvaise foi ou dans une intention frauduleuse (Cass. soc. 7 mars 2012, n° 10-12091).

Ainsi, si le salarié, par mauvaise foi ou intention frauduleuse a refusé de signer son contrat à durée déterminée, il se verra débouter par le juge de sa demande de requalification en CDI.

L’arrêt commenté du 10 avril 2019 (Cass. Soc. 10.04.2019 : RG n° 18-10614) est la confirmation de cette jurisprudence.

Un salarié avait été embauché en CDD en tant qu’assistant chef de projet par une agence de communication.

Alors qu’il avait commencé à exécuter sa prestation en connaissant sans ambiguïté qu’il s’agissait d’un contrat à durée déterminée, il a refusé de signer son contrat de travail.

Il avait saisi la juridiction prud’homale pour obtenir la requalification du CDD en CDI, et demander les indemnités ci avant listées.

Au visa de l’article L. 1242-12 du code du travail, la Cour de Cassation rappelle sa jurisprudence constante que la signature d’un contrat de travail à durée déterminée a le caractère d’une prescription d’ordre public dont l’omission entraîne, à la demande du salarié, la requalification en contrat à durée indéterminée ; qu’il n’en va autrement que lorsque le salarié a délibérément refusé de signer le contrat de travail de mauvaise foi ou dans une intention frauduleuse.

Pour la Cour de cassation, il est indispensable de rapporter la preuve du refus délibéré de signer le CDD, et donc il convient de prouver la mauvaise foi ou l’intention frauduleuse de celui-ci.

Sources : 

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 10 avril 2019 : RG n°18-10614

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 26 octobre 1999 : RG n° 97-40894

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 26 octobre 1999 : RG n° 97-41992

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 12 décembre 2012 : RG n° 11-14823

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 14 novembre 2018 : RG n° 16-19038

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 7 mars 2012 : RG n° 10-12091

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 11 juillet 2000 : RG n° 98-41798

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 10 juin 2003 : RG n° 01-40808

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 13 décembre 2007 : RG n° 06-44004

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 3 juin 2009 : RG n° 08-41037 

Par Maitre Virginie LANGLET le 27 mai 2019

Avocat au Barreau de Paris

8 rue Blanche – 75009 PARIS

Tél : 01.84.79.16.30

www.cabinet-avocats-langlet.fr

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