Harcèlement moral : l’employeur doit indemniser le préjudice du salarié, quel que soit son comportement

Le comportement du salarié victime de harcèlement moral ne peut venir limiter le montant de l’indemnisation du préjudice qu’il subit (Cass. soc. 13.06.2019 : RG n° 18-11115).

Qu’est ce que le harcèlement moral

Les agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail d’un salarié susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignitéd’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel sont interdits (art. L 1152-1 c.trav.).

Ainsi, le harcèlement moral se définit par ses éléments constitutifs et les conséquences sur la victime.

Des agissements répétés fautifs pour caractériser le harcèlement moral

Le harcèlement moral doit résulter d’agissements répétés de la part de leur auteur à l’encontre du salarié victime.

Le harcèlement moral ne peut jamais porter sur un acte isolé, même si cet agissement est grave.

Les agissements répétés peuvent être de même nature (comme par exemple une mise à l’écart qui dure dans le temps) (Cass. crim. 26.01.2016, n° 14-80455).

Si ces agissements sont effectivement répétés, le harcèlement moral est caractérisé.

Le harcèlement moral peut être établi même si les faits répétés se sont déroulés sur une courte période (Cass. soc. 26.05.2010, n° 08-43152).

La question n’est donc pas la durée des faits mais leur répétition.

Le harcèlement moral entraine la dégradation des conditions de travail

Le harcèlement moral doit avoir pour conséquence, pour sa victime, la dégradation des conditions de travail.

Il importe peu que l’auteur du harcèlement moral n’ait pas délibérément cherché à nuire au salarié.

Le harcèlement moral doit porter atteinte à la dignité, la carrière ou la santé du salarié victime

Les actes fautifs peuvent être qualifiés de harcèlement moral dès l’instant où ils ont entraîné une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à la dignité ou à la santé du salarié, ou de compromettre son avenir professionnel (Cass. soc. 10.11.2009, n° 08-41497 ; Cass. soc. 15.11.2011, n° 10-30463).

C’est bien l’atteinte à la dignité ou à la santé physique ou morale (voire les deux parfois) du salarié qui doit être la conséquence des agissements fautifs.

De la même manière, si la situation professionnelle du salarié victime est menacée, mise en péril ou totalement ruinée, les agissements répétés seront caractérisés de harcèlement moral.

Les enjeux du comportement du salarié victime de harcèlement moral

En cas de contentieux, les juges doivent rechercher si les faits dont ils sont saisis caractérisent un harcèlement moral, sans prendre en compte le comportement de la victime (Cass. crim. 27 mai 2015, n° 14-81489).

C’est ce que confirme la Cour de cassation dans l’arrêt du 13 juin 2019 (Cass. soc. 13.06.2019 : RG n° 18-11115).

En l’espèce, une salariée avait été engagée au poste de technicienne intervention sociale et familiale par une association.

Elle occupait en outre plusieurs mandats représentatifs.

S’estimant victime d’agissements de harcèlement moral et de discrimination syndicale, elle a saisi la juridiction prud’homale afin d’obtenir la condamnation de son employeur à lui verser des dommages et intérêts, en réparation du préjudice qu’elle avait subi.

Le harcèlement moral a bien été reconnu par les juges.

En revanche, la cour d’appel avait décidé de limiter le montant de l’indemnisation allouée en réparation du préjudice causé par ce harcèlement moral.

La cour d’appel considérait en effet que le propre comportement de la salariée victime, notamment lors des réunions des représentants du personnel, avait pu contribuer à la dégradation de ses conditions de travail.

La Cour de cassation n’est pas de cet avis et elle casse l’arrêt d’appel.

La Haute Cour précise que le comportement de la victime de harcèlement moral n’est pas un élément susceptible d’être pris en compte pour apprécier à la baisse le montant des dommages et intérêts.

Cette décision est l’occasion de préciser que si le comportement de la victime ne peut pas, une fois le harcèlement qualifié, influer sur le montant des dommages et intérêts, il peut, lors de l’examen des faits, exclure la qualification de harcèlement moral (Cass. soc. 04.11.2015 n° 14-12281).

Il faut donc toujours faire attention à son propre comportement dans l’entreprise. Tout ne relève pas de la responsabilité de l’employeur.

Sources : 

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 13 juin 2019 : RG n° 18-11115

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 26 mai 2010 : RG n° 08-43152

Cour de cassation, chambre criminelle, arrêt du 26 janvier 2016 : RG n° 14-80455

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 10 novembre 2009 : RG n° 08-41497

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 15 novembre 2011 : RG n° 10-30463

Cour de cassation, chambre criminelle, arrêt du 27 mai 2015 : RG n° 14-81489

Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 4 novembre 2015 : RG n° 14-12281

Par Maitre Virginie LANGLET le 15 juillet 2019

Avocat au Barreau de Paris

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