Les avances répétées de nature sexuelle c’est du harcèlement sexuel

Les avances persistantes, malgré les refus réitérés de la salariée caractérisent bien un harcèlement sexuel, même si ces avances ne sont ni injurieuses ni blessantes (Cass. crim. 18 novembre 2020 : n°19-81790).

Pour une fois, nous vous proposons un arrêt très évocateur rendu par la chambre criminelle de la Cour de cassation et non pas la chambre sociale.

Cette décision, dont les principes pourraient être dégagés de la même manière par la chambre sociale de la Cour de cassation, apporte beaucoup d’informations sur les comportements interdits en matière de harcèlement sexuel dans les relations entre collègues (ou entre supérieur et subordonné hiérarchiques).

La définition pénale du délit de harcèlement sexuel

La définition pénale du délit de harcèlement sexuel est la suivante, en application de l’article 222-33-I du code pénal. :

  • Il s’agit du fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste, qui :
  • Soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant,
  • Soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.

Comment se caractérisent les agissements de harcèlement sexuel ?

  • Tout d’abord, il importe peu que le salarié poursuivi ait mésestimé la portée de ses agissements.

Il suffit qu’il ait, en connaissance de causeimposé aux victimes, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle les ayant placées dans une situation intimidante, hostile ou offensante et objectivement constatée (Cass. crim. 18 novembre 2015 : n°14-85591).

  • L’absence de consentement de la victime est également un élément constitutif du délit du harcèlement sexuel.

Il n’est pas nécessaire que la victime ait fait connaître de façon expresse et explicite à l’auteur des faits qu’elle n’était pas consentante (par exemple, par une demande écrite ou devant témoins de mettre un terme aux agissements).

L’absence de consentement peut résulter du contexte dans lequel les faits ont été commis : par exemple un silence permanent face aux agissements.

  • Le harcèlement sexuel peut être caractérisé, et sanctionné par l’employeur, même s’il se déroule en dehors de l’entreprise. 

En effet, un salarié qui abuse de son pouvoir hiérarchique dans le but d’obtenir des faveurs sexuelles de collègues de travail se rend coupable de faits de harcèlement sexuel, même si les agissements ont lieu en dehors du temps et du lieu de travail (Cass. soc. 11 janvier 2012, n° 10-12930).

Même si les avances répétées ne sont ni injurieuses ni blessantes, il y a harcèlement sexuel

C’est ce qu’a confirmé la chambre criminelle de la Cour de cassation (Cass. crim. 18 novembre 2020 : n°19-81790).

Les faits :

Dans cette affaire, durant plus de 3 ans, un supérieur hiérarchique d’une salariée lui avait écrit des mails et des billets dans lesquels il exprimait son désir explicite d’avoir une relation d’ordre sexuel avec elle.

La salariée avait très clairement manifesté ne pas consentir, puisqu’elle lui avait répété de façon ferme et explicite qu’elle ne voulait pas répondre favorablement à ses avances.

Elle lui avait en outre demandé de cesser de lui écrire.

Au bout de 3 ans, la salariée a été déclarée inapte temporairement en raison de cette situation de harcèlement. Le médecin avait conditionné son retour au travail à un éloignement de son supérieur.

Las, la salariée avait déposé plainte contre son supérieur hiérarchique pour harcèlement sexuel.

La Cour d’appel avait reconnu les faits de harcèlement sexuel imposés par le supérieur à la salariée.

L’avis des juges :

Les juges d’appel avaient estimé que le supérieur avait imposé « d’une façon réitérée, des propos à connotation sexuelle, en dehors de tout contexte de plaisanterie ou de familiarité, créant à son encontre une situation offensante, génératrice d’une incapacité de travail ».

La Cour de cassation a confirmé l’arrêt d’appel.

Pour le supérieur hiérarchique mis en cause, il ne pouvait y avoir harcèlement sexuel puisque ses avances n’avaient pas été ni blessantes, ni injurieuses ou ni insultantes, et encore moins avilissantes ou hostiles.

Il n’avait donc pas créé de situation offensante pour la salariée….

La Cour de cassation, tout comme les juges d’appel ne sont pas de cet avis puisque la situation avait entrainé l’inaptitude temporaire de la salariée victime des agissements de harcèlement sexuel.

Peu importe que les avances ne soient ni blessantes, ni injurieuse, ou qu’elles puissent éventuellement ressembler à des compliments.

Le caractère insistant, et répété des avances, malgré le refus de la salarié, suffit à contribuer à porter atteinte à la dignité de la salariée et à générer une situation offensante.

Le supérieur hiérarchique a donc bien été condamné à une peine d’un an d’emprisonnement avec sursis.

En conclusion

Il est impératif de veiller à son attitude à l’égard de ses collègues en entreprise.

Non, c’est non. Insister, c’est harceler sexuellement, et c’est puni par la loi.

Le supérieur aurait également pu être licencié pour faute grave, ce qui témoigne de la gravité de ses actes.

Sources :

Cour de Cassation, chambre criminelle, arrêt du 18 novembre 2020 : RG n° 19-81790

Cour de Cassation, chambre criminelle, arrêt du 18 novembre 2015 : n°14-85591

Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 11 janvier 2012 : RG n° 10-12930

Par Maitre Virginie LANGLET le 26 janvier 2021

Avocat au Barreau de Paris

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