L’inégalité de salaire entre les femmes et les hommes – et donc la discrimination fondée sur le sexe – a encore de beaux jours devant elle.
C’est ainsi que cette année, le 6 novembre 2023, les Françaises ont commencé à travailler gratuitement, en raison des écarts de salaires entre les femmes et les hommes.
Ce sont les Glorieuses, dans leur newsletter qui nous ont fait part de cette information.
« En 2023, les femmes commencent à travailler gratuitement à partir du #6Novembre11h25. Et ce, jusqu’à la fin de l’année ».
A titre personnel, ce constat me révolte.
Au-delà de mes états d’âmes, rappelons quelques règles de droit en matière de discrimination et inégalité salariale.
Sommaire
Qu’est-ce que la discrimination ?
Le code du travail nous en donne la définition : article L 1132-1.
La discrimination c’est lorsqu’au sein de l’entreprise,
- un salarié se voit moins bien traitée qu’une autre : il est écarté d’une procédure de recrutement, de l’accès à un stage, une formation, est sanctionné, licencié, moins bien payé, etc
- en raison de ce qu’il est ou qui il est ou ses valeurs : son origine, son sexe, ses mœurs, son orientation ou identité sexuelle, son âge, sa situation de famille ou sa grossesse, ses caractéristiques génétiques, son appartenance ou non à une ethnie, une nation, une race, ses opinions politiques, ses activités syndicales, ses convictions religieuses, son apparence physique, son lieu de résidence ou son état de santé.
En matière de salaire, les femmes continuent encore, dans certaines entreprises (encore trop nombreuses) de percevoir une rémunération inférieure à celle des hommes, à poste égale, compétences égales, ancienneté égale.
En France, en raison des inégalités de salaires, les femmes sont payées 15,4% de moins que les hommes selon Eurostat.
Comment une femme peut prouver la discrimination salariale dont elle est victime en entreprise ?
Par exemple, en exigeant de son employeur qu’il lui remette les bulletins de paie de ses collègues masculins qui occupent les mêmes fonctions qu’elle.
La Cour de cassation a validé cette demande dans un arrêt du 8 mars 2023 (tiens, journée de la femme) : chambre sociale n°21-12492
Dans cette affaire, une salariée estimait être victime d’une inégalité salariale.
Elle voulait le prouver et saisir la juridiction prud’homale.
Elle a donc demandé à son employeur de lui remettre les bulletins de paie de 8 de ses collègues masculins qui occupent ou qui ont occupé le même poste qu’elle.
Son employeur s’y est opposé au motif que la remise de ces bulletins de paie porterait atteinte à la vie privée des salariés en cause.
Il se retranchait derrière la protection de la vie privée au prétexte qu’il n’était pas autorisé à communiquer les données personnelles des salariés à d’autres.
La salariée n’était pas d’accord avec ce point de vue dans la mesure où ce qui l’intéressait était simplement les noms, prénoms et rémunérations de ses collègues. Les autres informations pouvaient bien être dissimulées.
La Cour de cassation a validé la position de la salariée.
Pour les juges, ces bulletins de paie sont indispensables pour prouver la discrimination salariale pratiquée dans l’entreprise et donc le préjudice de la salariée.
L’employeur devait donc les lui remettre, à la condition, évidemment, de camoufler les informations personnelles non nécessaires à la preuve du préjudice.
Sources :
Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 8 mars 2023, no 21-12492
Par Maitre Virginie LANGLET le 8 novembre 2023
Avocat au Barreau de Paris
8 rue Blanche – 75009 PARIS
Tél : 01.84.79.16.30