Vous souhaitez engager une procédure devant le conseil de prud’hommes.
En avez-vous seulement la possibilité ? êtes-vous encore dans les délais ?
Lorsqu’un salarié envisage d’engager une action contre son employeur devant le conseil de prud’hommes, la question des délais de prescription est primordiale.
Un droit non exercé dans les délais légaux est, dans la plupart des cas, définitivement perdu, même si la demande est parfaitement fondée sur le fond.
En pratique, de nombreux salariés découvrent trop tard qu’ils sont prescrits, faute d’avoir agi à temps ou d’avoir été correctement informés.
👉 voici un panorama clair des principaux délais de prescription en droit du travail, tels qu’ils s’appliquent aux actions engagées par un salarié devant le conseil de prud’hommes.
Sommaire
- 1 Qu’est-ce qu’un délai de prescription en droit du travail ?
- 2 La contestation du licenciement et de la rupture conventionnelle : 12 mois
- 3 Le délai de prescription de droit commun : 2 ans
- 4 Les rappels de salaire : 3 ans
- 5 Le harcèlement moral ou sexuel : 5 ans
- 6 La discrimination : 5 ans
- 7 Les accidents du travail et maladies professionnelles
- 8 Comment compter le délai de prescription
- 9 Quelles sont les causes d’interruption et de suspension de la prescription
- 10 Pourquoi consulter un avocat en droit du travail avant d’agir ?
Qu’est-ce qu’un délai de prescription en droit du travail ?
La possibilité de saisir le juge est limitée dans le temps par un délai dit « de prescription », à l’exception des crimes contre l’humanité qui sont imprescriptibles (c. proc. pén. art. 7).
En droit du travail, le délai de prescription applicable varie selon :
- la nature du litige (licenciement, salaire, harcèlement, discrimination, etc.) ;
- l’objet de la demande (exécution ou rupture du contrat de travail) ;
- parfois, la date à laquelle le salarié a eu connaissance des faits.
Au-delà de ce délai de prescription, une action en justice devient impossible.
C’est à la partie (l’employeur ou le salarié) qui est attaquée devant le conseil de prud’hommes de faire valoir, pour se défendre, que celui qui a saisi le juge a agi trop tard.
Elle peut opposer la prescription même devant la cour d’appel (c. civ. art. 2248).
Le juge ne peut pas décider seul de vérifier s’il a été saisi dans les délais (c. civ. art. 2247). Il faut donc être très vigilant dans l’organisation de sa défense.
⚠️ Attention : la prescription ne s’apprécie pas toujours à la date des faits, mais parfois à la date de leur révélation ou de leur consolidation.
La contestation du licenciement et de la rupture conventionnelle : 12 mois
Un délai spécifique et strict
La contestation d’un licenciement (pour motif personnel ou économique) est soumise à un délai de prescription réduit à 12 mois.
📌 Article L.1471-1 du Code du travail
Ce délai concerne notamment :
- la contestation du motif du licenciement ;
- la remise en cause de la procédure ;
- les demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Point de départ
Le délai de 12 mois court à compter de la notification du licenciement, c’est-à-dire en pratique à la date de première présentation de la lettre recommandée.
⚠️ Passé ce délai, toute contestation du licenciement est irrecevable, même si le licenciement est manifestement injustifié.
Ce délai de 12 mois s’applique également pour la contestation de la rupture conventionnelle.
Le délai de prescription de droit commun : 2 ans
Depuis les réformes successives du droit du travail, le délai de prescription de droit commun est de 2 ans pour les actions portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail.
📌 Article L.1471-1 du Code du travail
Ce délai s’applique notamment aux actions relatives :
- à l’exécution fautive du contrat de travail ;
- aux sanctions disciplinaires ;
- à la contestation de certaines clauses contractuelles ;
- à des manquements de l’employeur (hors exceptions spécifiques).
Point de départ :
Le délai court à compter du jour où le salarié a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.
Les rappels de salaire : 3 ans
Un délai plus long pour les créances salariales
Les actions portant sur le paiement ou le rappel de salaire se prescrivent par 3 ans.
📌 Article L.3245-1 du Code du travail
Cela concerne notamment :
- les salaires impayés ou partiellement payés ;
- les heures supplémentaires ;
- les primes contractuelles ou conventionnelles ;
- les commissions ;
- les indemnités diverses ayant la nature de salaire.
Limitation dans le temps
Même si l’action est engagée dans le délai de 3 ans, le salarié ne peut en principe obtenir un rappel que sur les 3 années précédant la saisine du conseil de prud’hommes.
Le harcèlement moral ou sexuel : 5 ans
Un régime protecteur
Les actions fondées sur des faits de harcèlement moral ou sexuel relèvent du délai de prescription de 5 ans.
📌 Article 2224 du Code civil
Ce délai concerne :
- la reconnaissance du harcèlement ;
- les demandes de dommages et intérêts ;
- les conséquences du harcèlement sur la rupture du contrat.
Point de départ
Le délai de prescription court à compter du dernier fait de harcèlement, ce qui permet une prise en compte globale de situations s’inscrivant dans la durée.
La discrimination : 5 ans
Les actions en matière de discrimination (sexe, âge, état de santé, origine, activité syndicale, etc.) se prescrivent également par 5 ans.
📌 Article L.1134-5 du Code du travail
Le délai court à compter de la révélation de la discrimination, ce qui peut être bien postérieur aux faits eux-mêmes.
👉 Ce régime est particulièrement important pour les carrières longues ou les situations d’évolution professionnelle bloquée.
Les accidents du travail et maladies professionnelles
Les litiges liés à la reconnaissance ou aux conséquences d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle obéissent à des règles spécifiques, mêlant droit de la sécurité sociale et droit du travail.
Les délais peuvent varier selon :
- la nature de la demande ;
- l’organisme saisi ;
- la date de consolidation.
👉 Un accompagnement juridique est ici fortement recommandé.
Comment compter le délai de prescription
La prescription se compte par jours, et non par heures.
Le jour pendant lequel se produit l’événement d’où court le délai de prescription ne compte pas dans ce délai (c. civ. art. 2228 ; cass. soc. 21 mai 2025, n° 24-10009).
La prescription est acquise lorsque le dernier jour du terme est accompli (c. civ. art. 2229).
Par exemple, si la prescription est de 12 mois et qu’elle commence à courir un 9 août, elle est acquise le 8 août de l’année suivante, à minuit (dernier jour du terme accompli). Au-delà de cette date, aucune action en justice ne sera possible.
Quelles sont les causes d’interruption et de suspension de la prescription
Certains événements peuvent interrompre ou suspendre la prescription, notamment :
- la saisine du conseil de prud’hommes ;
- une reconnaissance de dette par l’employeur ;
- certains recours amiables encadrés.
⚠️ En revanche, de simples échanges informels, courriels ou négociations non formalisées n’interrompent pas nécessairement la prescription.
En cas d’interruption de la prescription, un nouveau délai recommence à courir de zéro à compter de la date de l’acte interruptif (c. civ. art. 2231).
Par exemple, la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion (c. civ. art. 2241), sachant que l’interruption est non avenue si le demandeur se désiste de sa demande ou laisse périmer l’instance, ou si sa demande est définitivement rejetée (c. civ. art. 2243).
Pourquoi consulter un avocat en droit du travail avant d’agir ?
La computation des délais de prescription est l’une des principales sources d’irrecevabilité devant le conseil de prud’hommes.
Un avocat en droit du travail permet notamment de :
- qualifier juridiquement les faits ;
- identifier le bon délai applicable ;
- sécuriser le point de départ de la prescription ;
- engager l’action dans les temps et avec la bonne stratégie.
👉 Vous envisagez de saisir le conseil de prud’hommes ? Avant toute démarche, il est essentiel de vérifier que vos droits ne sont pas prescrits et d’adopter la bonne stratégie contentieuse.
Un premier échange avec un avocat en droit du travail permet souvent d’éviter des erreurs irréversibles et de sécuriser vos intérêts.
Par Maitre Virginie LANGLET le 15 décembre 2025
Avocat au Barreau de Paris
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