Prise d’acte et licenciement sans cause réelle et sérieuse

Les indemnités dues suite à une prise d’acte produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse

La prise d’acte qui produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse fait bénéficier au salarié de l’indemnité de préavis et les congés payés afférents, l’indemnité de licenciement et les dommages-intérêts auxquels il aurait eu droit en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. Soc. 14.09.2016 : n°14-16663).

Prise d’acte de la rupture du contrat de travail

Un salarié peut prendre acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur. Seul le salarié en contrat à durée indéterminée (CDI) peut prendre acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur.

Le salarié ne peut prendre acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur que lorsqu’il lui reproche de ne pas respecter ses obligations de façon grave.

Différentes catégories de faits peuvent être reprochées à l’employeur, et notamment :

  • une inexécution de ses obligations contractuelles ou conventionnelles (ex. : non-paiement du salaire, modification de la qualification professionnelle sans l’accord du salarié) ;
  • une attitude fautive (ex. : non-respect de règles d’hygiène, harcèlement, etc.).

Les faits fautifs ou les inexécutions des obligations contractuelles ou conventionnelles de l’employeur doivent être suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite de la relation contractuelle (Cass. soc. 30.03.2010, n°08-44236).

Attention, le fait que les manquements reprochés à l’employeur soient anciens vide la prise d’acte de son fondement dans la mesure où le contrat de travail a pu se poursuivre malgré l’attitude de l’employeur (Cass. soc. 26.03.2014, n° 12-23634).

La procédure de la prise d’acte

La prise d’acte de la rupture du contrat de travail ne requiert aucun formalisme particulier, mais la plupart du temps, le salarié envoie une lettre recommandée avec avis de réception (LRAR) ou il remet son courrier directement à l’employeur. Cela permet de dater précisément la prise d’acte et d’éviter tout doute sur le mode de rupture.

Il est également possible pour le salarié de prendre acte de la rupture de son contrat de travail par l’intermédiaire de son avocat qui adresse un courrier en son nom (Cass. soc. 04.04.2007, n°05-42847). Dans ce cas, le conseil doit s’adresser directement à l’employeur du salarié concerné (Cass. soc. 16.05.2012, n°10-15238).

La prise d’acte de la rupture de son contrat de travail par le salarié entraîne la cessation immédiate du contrat (Cass. soc. 31.10.2006, n°04-46280 ; Cass. soc. 25.02.2009, n°06-46436). La prise d’acte rompant immédiatement le contrat de travail, le salarié n’est pas tenu d’exécuter un préavis.

Les effets de la prise d’acte

La prise d’acte peut produire les effets d’une démission si les juges estiment que les griefs invoqués par le salarié ne justifiaient pas la rupture du contrat.

La prise d’acte peut tout aussi bien produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse lorsque les juges estiment que les griefs reprochés à l’employeur justifient la rupture du contrat. Dans ce cas, le salarié a droit à l’indemnité de licenciement, à une indemnité compensatrice de préavis et à des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le salarié a droit à l’indemnité compensatrice de préavis et à l’indemnité de congés payés sur préavis même s’il a été dispensé de préavis à sa demande (Cass. soc. 20.01.2010, n°08-43471).

L’arrêt du 14 septembre 2016 (Cass. Soc. 14.09.2016 : n°14-16663) est venu confirmer que ces indemnités étaient dues, quand bien même le salarié aurait retrouvé un emploi juste après la prise d’acte. En l’espèce, le salarié avait vu le montant de l’indemnité compensatrice de préavis limité par la Cour d’appel au motif que le salarié avait été embauché par un nouvel employeur quelques jours seulement après sa prise d’acte. La Cour de Cassation n’est pas de cet avis et a censuré l’arrêt d’appel en rappelant que le salarié devait percevoir l’intégralité des indemnités dues.

En revanche, le salarié ne peut pas prétendre à une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement (Cass. soc. 31.10.2013 n°12-16786 ; Cass. soc. 19.02.2014, n°12-28153).

Sources :

  • Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 14 septembre 2016 : RG n°14-16663
  • Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 24 mars 2014 : RG n°12-23634
  • Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 30 mars 2010 : RG n°08-44236
  • Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 4 avril 2007 : RG n°05-42847
  • Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 16 mai 2012 : RG n°10-15238
  • Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 31 octobre 2006 : RG n°04-46280
  • Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 25 février 2009 : RG n°06-46436
  • Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 20 janvier 2010 : RG n°08-43471
  • Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 31 octobre 2013 : RG n°12-16786
  • Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 19 février 2014 : RG n°12-28153
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